Suffit-il de voir le meilleur pour le suivre ?

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L'analyse du professeur


L’ambiguïté de ce sujet tient à la définition que l’on peut donner du meilleur. Le meilleur est-il ce qu’un individu conçoit comme bon par lui-même, ou de ce que les règles morales ou politiques lui imposent comme bon ? La question posée interroge la rationalité de l’individu, en tant que le fait de posséder une raison individuelle permettrait de devenir raisonnable en un sens collectif. En ce sens, ce sujet suppose d’abord implicitement qu’un individu a les capacités à discerner le meilleur, c’est-à-dire qu’il a les capacités de fonder son action sur une connaissance morale de choses. Autrement dit, c’est lorsque je m’efforce de connaître la nature d’une chose que je peux fonder mon action en raison : mieux je connais les choses, mieux j’agis ; plus je suis rationnel, plus je deviens raisonnable. Que faut-il alors entendre par raisonnable, si par ailleurs chacun est libre d’agir selon ce qu’il veut ? Il serait évidemment absurde de prétendre que je peux agir en voulant le moins bon. En revanche, je peux très bien agir en voulant une chose que je considère comme bonne, mais qui s’avère en fait mauvaise pour moi ou, pire encore, bonne pour moi mais mauvaise pour le reste des hommes. Dès lors, le meilleur pour moi peut ne pas être réellement le meilleur pour moi, et n’est pas nécessairement le meilleur pour les autres. Le problème est donc de savoir si le critère individuel du meilleur reconduit nécessairement à un critère collectif, ou si au contraire il s’y oppose nécessairement.

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

Il semble naturel de penser que la connaissance du meilleur permet l’action la meilleure parce que la plus éclairée. Voir le meilleur et ne pas le suivre serait donc fondamentalement absurde, puisqu’il s’agirait d’une action contraire au bien de l’individu et à son maintien dans l’existence.

b

Ne peut-on toutefois constater que les hommes se trompent souvent, et qu’ils suivent des finalités dont ils finissent par s’apercevoir qu’elles ne sont pas bonnes, et qu’elles ne correspondent pas à leurs attentes ?

c

Dès lors, il faudrait distinguer le bien apparent du bien réel, et en conclure qu’il ne suffit pas de « voir » le meilleur pour le suivre, mais qu’il faut le « connaître » en vérité.

Partie 2

a

Cependant, cela revient à faire de l’homme un être purement rationnel qui agit toujours en raison de motifs bien pesés. Or, nous sommes également, en tant qu’hommes, victimes de passions qui nous conduisent à poursuivre des finalités qui se révèlent néfastes non pas tant parce que nous nous serions trompés sur elles que parce que nous nous sommes trompés sur ce que nous sommes nous-mêmes.

b

Dès lors, nous pouvons être confrontés à des conflits moraux selon lesquels nous pensons qu’une chose bonne moralement pour l’ensemble des hommes n’est pas forcément bonne pour nous.

c

Le meilleur n’est donc pas la seule condition d’une action qui peut, plus pragmatiquement, tendre à l’utile, au nécessaire (ne parle-t-on pas de mal nécessaire, par exemple ?).

Partie 3

a

Le critère du meilleur semble alors purement relatif. Dans le cas du choix passionnel, l’homme suit en effet une chose dont il sait qu’elle ne serait pas considérée comme la meilleure par tous, mais qu’il juge lui-même la meilleure dans la situation présente et selon ses attentes personnelles.

b

Serait-il pourtant vain de vouloir réconcilier le critère individuel et le critère collectif du bien ? L’homme ne peut-il, ne doit-il pas se débarasser de toute passion pour parvenir à un meilleur qui ne dépendrait pas simplement de son plaisir particulier mais lui permettrait un bonheur plus général ?

c

Le meilleur qui nous apparaît subjectivement, qui n’est pas le meilleur pour tous, n’est donc pas réellement le meilleur, puisqu’il ne fait que satisfaire une passion et ne contente jamais durablement l’individu.