L'analyse du professeur
Si nous considérons que le désir procède de la représentation mentale d’un objet particulier considéré comme bon pour un homme, il convient alors de remarquer que le désir est une façon pour l’homme de chercher à améliorer son existence. Mais le désir est en même temps l’affirmation d’un manque et, de la sorte, comporte toujours le risque d’engager une déception voire une frustration s’il n’est pas assouvi.
Cette ambivalence du désir est d’autant plus cruelle qu’il semble bien qu’une bonne part de nos désirs ne sont pas vitaux. En effet, dès l’instant où le désir procède d’une forme de choix (puisqu’il suppose une représentation mentale, même approximative voir illusoire), l’homme qui désire peut être conduit à se représenter des choses fondamentalement inutiles comme éminemment indispensables. Ce qu’il s’agit donc de comprendre est la raison pour laquelle l’homme peut se tromper ainsi et poser comme indispensables des choses qui, selon un strict critère de nécessité vitale, sont inutiles. Faut-il alors supposer que le fait que l’homme soit doté d’une conscience de ce qu’il fait induit nécessairement des faux désirs ? Autrement dit, faudrait-il distinguer plusieurs critères de la nécessité et remarquer que ce qui n’est pas nécessaire du strict point de vue animal (pour la vie du corps) peut l’être du point de vue psychologique (pour satisfaire la représentation mentale que l’on se fait de soi) ?
[...]
Plan proposé
Partie 1
a
Il semble nécessaire de partir de la distinction entre le désir et le besoin pour expliquer le fait que le désir procède de l’esprit et de ses représentations.
b
En ce sens, le désir n’est jamais une nécessité vitale mais relève plutôt d’une représentation mentale qui pose une chose non nécessaire comme désirable.
c
Dès lors, le désir tient à la façon dont l’homme projette mentalement son existence et les conditions de son amélioration.
Partie 2
a
Néanmoins, en concevant que le désir n’est pas purement volontaire mais s’impose à l’esprit, il semble possible de nuancer la conclusion de la partie précédente. En effet, le fait que le désir relève en grande partie de l’inconscient,
b
déclenche un rapport passionnel à un objet qui relève alors d’une nécessité psychologique
c
et se renouvelle sans cesse (tout désir n’est jamais purement satisfait mais laisse place à un nouveau désir), conduit à penser que l’homme ne désire jamais vraiment des choses inutiles (c). Plus exactement, si les choses peuvent apparaître non nécessaires, ce n’est que selon un critère trop restrictif qui ne prend pas en compte la dépendance psychologique qui est vécue comme une dépendance vitale par celui qui désire. L’homme n’aurait ainsi que le choix de désirer le nécessaire.
Partie 3
a
Dès lors, il est probable que la raison du désir pour ce qui n’est pas nécessaire ne peut s’évaluer à partir d’une stricte considération objective des choses désirées. En effet, si le désir ne distingue pas, à un niveau psychologique, le nécessaire du superflu et considère toute chose comme vitale, c’est vraisemblablement parce que le désir ne désire pas tant la chose pour ce qu’elle est vraiment
b
qu’en raison de l’idée que la personne qui désire s’en fait.
c
En ce sens, l’homme désire des choses qui ne sont pas forcément nécessaires à son existence parce qu’il se définit fondamentalement comme un être de désir qui a besoin de désirer sans pour autant accorder d’importance à ce que sont les choses mais en accordant paradoxalement une importance vitale à des choses superflues.