Les paroles engagent-elles autant que les actes ?

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L'analyse du professeur


Ce sujet demande de juger de la valeur comparative de l’engagement pris en paroles et de celui manifesté par les actes. Nous pouvons définir les paroles comme des actes de langage (aussi bien réfléchis qu’irréfléchis) ayant pour but de traduire la pensée c’est-à-dire une forme d’intention exprimée dans la possible réalisation des paroles. À l’inverse, les actes proprement dits désignent l’action matérielle, le fait d’agir concrètement. Dès lors, le problème que pose le sujet est celui de savoir dans quelle mesure l’engagement verbal possède une force concrète concurrençant la force matérielle de l’acte lui-même. Il convient toutefois de remarquer qu’il ne s’agit pas de comparer simplement des paroles et des actes, mais de réfléchir à ce qu’engagent les deux, c’est-à-dire à ce qu’il est possible de prévoir à la suite des paroles et qu’annoncent ces paroles, et à l’issue des actes, dans la façon dont ces actes signifient des conséquences ou d’autres actes à suivre. La complexité de ce sujet est donc de savoir si les actes engagent des choses aussi probables que ce qui est formulé intentionnellement dans un discours. Le paradoxe devient évident. Les paroles désignent clairement un acte à suivre en ce qu’elle le formulent effectivement, mais ne sont pas des actes et font donc douter du pouvoir de réalisation de ce qu’elles énoncent clairement. À l’inverse, les actes ne définissent peut-être pas aussi clairement leurs conséquences, et permettent de les prévoir, tout en signifiant que le pouvoir de faire est bien réel puisqu’un acte précède sa conséquence. une force concrète concurrençant la force matérielle de l’acte lui-même.

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

Il semble tout d’abord évident que les paroles sont moins directement fortes que les actes puisque les paroles sont des prises de position de la pensée qui n’agissent pas par elles-mêmes.

b

En outre, à la différence de l’acte, la parole obéit à une logique du discours, qui peut par exemple avoir pour fonction de persuader et de pousser à agir l’interlocuteur sans que le locuteur soit obligé lui-même d’agir, de passer à l’acte.

c

À l’inverse, les actes semblent clairement engager des conséquences, et disposer celui qui agit à la poursuite de son action qui est déjà effective et dont on ne voit pas pourquoi elle s’arrêterait.

Partie 2

a

Toutefois, nous pouvons peut-être dépasser cette évidence des paroles dévaluées par rapport aux actes pour mettre en valeur le fait que, dans toute communication, il y a une chose exprimée ou voulue, c’est-à-dire que l’acte prévu est inscrit dans un projet rationnel qui en présente la faisabilité et l’imminence.

b

Dès lors, l’engagement par la parole peut-être aussi réel que l’engagement par les actes puisque chacun peut comprendre que la chose est réalisable.

c

Enfin comme l’engagement par la parole prend place dans un contexte dans lequel la communication se fait, toute personne n’est pas seulement engagée à en évaluer la faisabilité : elle a en outre accès aux raisons de l’acte et non simplement à sa cause matérielle.

Partie 3

a

À cet égard d’ailleurs, si l’on se fie à ce qui fait le propre d’un engagement (l’intention de la personne, la promesse qu’elle fait et la fidélité a sa promesse), il semble bien que les paroles engagent plus que les actes puisque dans la parole rien ne dépend vraiment des conditions de réussite extérieures à l’individu.

b

La parole est donc un engagement plus profond parce que plus autonome et plus pur que l’acte, qui est toujours susceptible d’interprétation et d’erreur.

c

Enfin, l’acte est enfermé dans des conditions matérielles précises (une cause engage une conséquence), alors que la parole désigne une fin dont les moyens restent libres et qui est ainsi réalisable par des voies multiples.