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Lors des chocs pétroliers des années 1970, les rigidités induites par l’interventionnisme étatique ont souvent été mises en causes comme facteurs explicatifs essentiels de la crise économique qu’ont alors traversé la plupart des économies mondiales. Pourtant, la période des trente glorieuses qui s’achevait alors fut considérée comme une période de progrès social majeur, au cours de laquelle les politiques publiques ont pris en compte le fait que l’État ne pouvait être un simple arbitre neutre permettant le jeu des libertés individuelles sans en réguler les effets pervers. Loin de souscrire à une doctrine du « laissez faire, laissez passer », les gouvernements ont été investis d’un rôle social souvent perçu comme essentiel dans la raison d’être et la légitimité du politique. Comment alors concevoir le rôle des gouvernements ? Doivent-ils se contenter de garantir les libertés ? Cette question conduit à une ambiguïté. D’une part, il semble que le contrat qui fonde le pouvoir des gouvernements est d’abord un contrat de sécurité, essentiellement défini par une mission régalienne de garantie des libertés individuelles. D’autre part, il apparaît en pratique que la simple régulation des libertés formelles est insuffisante, puisque la pratique de ces libertés risque de conduire à des états de faits inégalitaires, à la faveur desquels certains individus s’octroient un pouvoir de domination problématique sur les autres. Le problème qui se pose ici exige de comprendre jusqu’à quel point l’exercice individuel de la liberté peut s’avérer problématique : peut-on croire que les libertés individuelles auront tendance à s’harmoniser spontanément, ou faut-il à l’inverse craindre qu’elles conduisent irrémédiablement au conflit ? Nous tâcherons tout d’abord de montrer que le rôle des gouvernements ne dépend pas réellement d’eux-mêmes, mais du type de souveraineté en vigueur, ce qui semble conduire à reconnaître que l’action des gouvernements est limitée par principe au respect de la liberté de chacun (I). Nous en viendrons toutefois à mettre en question cette compréhension du rôle des gouvernements, pour mettre au jour le fait que cette fonction de garantie des libertés individuelles ne suffit pas réellement à préserver chacun de situations de marginalisation sociale (II). Nous chercherons alors à comprendre dans quelle mesure il serait possible de concilier l’exigence de neutralité de l’État (qui ne peut ruiner sa légitimité en prenant partie pour certains citoyens contre d’autres) avec celle de justice sociale (qui est essentielle pour garantir la dignité de chacun) (III).
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