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Dans La religion dans les limites de la simple raison, Kant défend une conception du Dieu qui semble entrer en contradiction avec une conception plus orthodoxe du divin, par exemple développée par les plus célèbres théologiens comme Augustin. Il ne se contente pas, en effet, de penser que la conception de Dieu et des commandements divins peut faire l’objet d’une analyse rationnelle, mais il montre plus profondément que Dieu ne peut faire l’objet d’un savoir vérifiable, et que toute forme de déduction de l’agir moral à partir de l’idée de Dieu est un pari vain et faux. Il semble, à cet égard, que le Dieu kantien ne peut être un Dieu classique ou traditionnel, dans la mesure où l’expérience de la foi paraît discréditée au profit d’une expérience rationnelle de la morale et des exigences pratiques. Toutefois, le fait d’avouer que la raison est impuissante à rationaliser le divin ne semble pas nécessairement impliquer de discrédit nécessaire de la foi. Tout au contraire, il apparaît que foi et raison peuvent se jouxter sans s’exclure, ou sans même se hiérarchiser. Autrement dit, le Dieu de Kant ne serait différent du Dieu de la métaphysique traditionnelle qu’à la condition de concevoir un primat de la méthode rationnelle et de son pouvoir exclusif de vérité sur les choses. Le problème sera donc de savoir dans quelle mesure un tel primat est ou non reconnu par Kant. Nous nous atttacherons à montrer dans un premier temps que le Dieu de Kant diffère profondément du Dieu traditionnel, puisqu’il n’est plus un Dieu de croyance, mais un paralogisme de la raison qui a besoin de postuler son existence pour donner un sens à sa croyance. Nous montrerons en ce sens, que cette différence d’essence du Dieu implique une différence d’existence, puisque l’omniprésence du Dieu dans le cours naturel des choses devient alors un retrait du Dieu, qui ne peut exister qu’à la mesure du règne des fins posées de façon autonome par les hommes. L’articulation de ces deux perspectives est cependant problématique, dans la mesure où le Dieu ainsi rationalisé par Kant n’exclut pas la présence d’un Dieu de l’intime, qui n’est autre que le Dieu traditionnel. Nous en viendrons ainsi à conclure notre raisonnement sur le constat selon lequel le Dieu de Kant est bien un Dieu traditionnel, puisque sa réalisation hypothétique n’a de sens qu’en fonction d’un agir moral de l’homme que la raison ne suffit pas à motiver.
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