L'analyse du professeur
La science semble s’opposer à la croyance. En effet, lorsque l’homme possède une croyance, il adhère à une explication que la raison ne peut justifier. La croyance repose sur une insuffisance de preuve et conduit à affirmer quelque chose dont nous ne sommes pas certains. En ce sens, la science aurait pour effet indirect de faire reculer la croyance en développant la connaissance. Cependant, nous n’observons pas nécessairement un tel recul, dans la mesure où non seulement les limites de la connaissance acquise laissent toujours la possibilité d’une croyance au sujet des choses que nous ne connaissons pas encore, mais en outre, la croyance paraît également s’alimenter des preuves que peut lui fournir le savoir. En effet, même si toute vérité scientifique peine à se poser comme définitive, la croyance qu’elle engage va consister à en faire une vérité absolue qui peut elle-même être un obstacle au développement de la science.
À cette perception classique des rapports entre science et croyance s’oppose toutefois une perception plus problématique qui montre que la science fait elle-même l’objet de croyances, au sens où les hypothèses qu’elle pose sont crédibles et engagent des convictions profondes quant aux représentations que les individus se font du monde. Le mouvement de la science apparaît alors comme paradoxal puisqu’il fait reculer les croyances traditionnelles mais en suscite de nouvelles, à la fois de façon externe, au-delà de ses propres démonstrations, et de façon interne, au sujet de ce qu’elle peut prouver.
[...]
Plan proposé
Partie 1
a
Il est donc d’abord possible de penser que la science fait progressivement disparaître la croyance en s’opposant aux motifs de croyance.
b
En outre, méthodologiquement, la science est opposée à la croyance puisque son mode de justification est rationnel et ne peut s’accommoder de l’adhésion sentimentale généralement propre aux croyances, notamment religieuses.
c
Dès lors, il semblerait normal que la science fasse reculer et disparaître les croyances, puisqu’elle a tendance à montrer que ces croyances ne sont que des appréhensions naïves de la réalité.
Partie 2
a
Toutefois, il convient d’articuler à cette analyse une définition plus précise de la croyance qui montre qu’elle ne repose pas seulement sur des raisons irrationnelles mais engage des convictions et des actes face auxquels le discours scientifiques reste étranger.
b
En ce sens, les actes de foi dépassent l’entendement rationnel et expriment un besoin moral individuel d’explication que l’analyse rationnel des sciences n’est pas en mesure de satisfaire.
c
Ce constat porte alors à penser que l’évolution de la science ne pourra faire disparaître la multiplicité des croyances, quand bien même elle mettrait en question la forme même des croyances et leurs certitudes.
Partie 3
a
Se pose alors la question du positionnement réciproque de la science et des croyances. Si la science a un pouvoir contre les croyances, c’est en tant qu’elle permet d’imposer une rationalité qui parvient à convaincre l’esprit de façon plus efficace que les affirmations des croyances.
b
Elle n’a donc pas pour effet de faire disparaître les croyances, mais de les obliger à faire disparaître leur caractère dogmatique, c’est-à-dire la façon dont elles imposent des règles de façon arbitraire.
c
Une telle évolution appelle réciproquement une adaptation du discours scientifique aux individus. S’il apparaît en effet souhaitable que les individus n’agissent plus sous la direction de croyances dogmatiques, il devient nécessaire que le discours de la science puisse convaincre les individus auxquels il s’adresse, ce qui appelle une vulgarisation et une adaptation du discours des sciences.