La religion conduit-elle l’homme au-delà de lui-même ?

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L'analyse du professeur


Le rapport de l’homme à la religion semble ambigu, comme l’atteste la dualité de l’étymologie de la religion qui désigne à la fois le fait de se recueillir (adhérer par la foi à un principe supérieur) et de se relier (entrer dans une communauté de fidèles). En effet, la religion comme croyance individuelle enseigne à l’homme sa fragilité et la précarité de son existence temporelle : accepter une vérité révéler, c’est accepter de ne pas s’appartenir totalement, de ne pas maîtriser tous les facteurs de son existence, et de dépendre de forces supérieures, divines et transcendantes. Cependant, toute religion peut également s’apparenter à un message d’espoir puisque la croyance enseigne à l’homme qu’il n’est pas perdu au milieu d’un monde qui lui serait définitivement hostile. Le problème de ce sujet se centre donc sur la question du sens à donner à la façon dont la religion pourrait « conduire l’homme au-delà de lui-même ». Cette expression ne recouvre-t-elle pas un paradoxe. La religion serait à ce titre à la fois être un message de dévalorisation de la situation de l’homme ici-bas (puisque la créature est fragile et pêcheresse et sa valeur se situerait dans un salut qui met fin à son existence terrestre) et un message d’espoir permettant à l’homme de ne pas souffrir de sa fragilité existentielle (puisque l’homme pourrait ainsi gagner son salut dans son existence terrestre). Ces deux interprétations du sujet sont-elles exclusives ? Comment comprendre leur rapport ?

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

La religion conduit l’homme au-delà de lui-même puisque la croyance en une transcendance dévalorise l’enfermement dans une vie matérielle et purement terrestre, qui ne correspond pas vraiment à l’homme. Vivre sans croyances revient bien souvent à vivre dans une illusion de la maîtrise de soi, sans s’interroger sur le sens fondamental des choses.

b

La religion permettrait ainsi à l’homme de dépasser la misère de son existence solitaire, parce qu’elle enseignerait une vérité originelle qui n’est pas présente immédiatement mais qui est pourtant nécessaire.

c

En ce sens, la religion force l’homme à changer son regard sur le monde, à se déprendre de sa subjectivité pour se vivre en communauté et s’ouvrir aux autres.

Partie 2

a

Ce dépassement de soi semble toutefois correspondre à un enfermement dans la mesure où l’homme se trouve confronté à une contradiction désespérante entre un monde terrestre qu’il ne peut quitter et une vérité transcendante qui lui reste interdite tant que dure son existence terrestre.

b

Ne faut-il pas alors voir la religion comme une dangereuse muse qui entretient l’homme dans l’espoir incertain d’une existence céleste, et qui le conduit donc indûment dans un au-delà qui n’est que fictif ?

c

La religion ne conduirait donc pas l’homme véritablement au-delà de lui-même, puisqu’elle nierait fondamentalement la valeur du moi et pousserait l’individu à se renier pour se plier à des règles comportementales.

Partie 3

a

Toutefois, plutôt qu’une dévalorisation fondamentale, peut-être faut-il considérer la religion comme un véritable dépassement de soi, c’est-à-dire comme un discours moral permettant à l’homme de ne pas se laisser enfermer dans ses peurs et ses passions immédiates.

b

La religion ne serait donc ni un discours enseignant une vérité révélée, ni une prescription commandant le renoncement à soi, mais une morale de vie qui apprend à comprendre son existence terrestre et à mieux la vivre.

c

Dès lors, la religion serait un enseignement de sagesse qui donne un sens à ce qui apparaît de prime abord absurde, et permet de prend le recul nécessaire pour ne pas souffrir de l’absurdité de ce qui arrive sans qu’on le veuille.