L’art, est-ce ce qui ne sert à rien ?

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L'analyse du professeur


Lorsque Marcel Duchamp installe un urinoir au milieu d’une salle de musée, non seulement il serait absurde d’essayer d’aller uriner à l’intérieur, mais en outre il semble indiquer et revendiquer l’inutilité de son oeuvre. Pourtant, cette oeuvre est devenue célébrissime au-delà de son usage possible. Sa gratuité fait qu’elle n’est pas utile, mais la façon dont elle nous interroge est d’une utilité insondable. En effet, Duchamp signifie par là que nous ne regardons les choses avec un regard toujours déjà utilitariste, intéressé et inattentif à ce qu’elles sont. En ce sens, la question de l’utilité de l’art est récurrente, dans la mesure où nous supposons implicitement que toute activité n’est pas à elle-même sa propre fin mais sert à autre chose (de la même façon que la médecine sert à soigner, soigner sert à être en bonne santé, être en bonne santé sert à bien vivre, bien vivre à être heureux etc.). Or, l’oeuvre d’art, comme chose destinée à être vue, à se montrer, semble se définir par une forme de gratuité esthétique l’affranchissant de toute utilité directe dans son rapport aux autres activités humaines. Il semble pourtant, par ailleurs, que le fait de contempler une oeuvre d’art procure des sensations, des idées, des impressions qui, si elles ne sont pas quantifiables très directement en termes d’utilité matérielle, sont pourtant importantes aux yeux des hommes. Tout le problème sera donc de montrer que le critère de l’utilité est, rapporté à l’art, ambigu. Nous nous attacherons tout d’abord à montrer que l’art est un savoir-faire qui possède techniquement une utilité propre. Ce constat strictement factuel nous conduira ensuite à remarquer qu’une oeuvre d’art n’est jamais dissociable du regard de celui qui la contemple. À cet égard l’oeuvre véhicule un message utile à celui qui veut bien l’entendre parce qu’elle donne à voir. Enfin, au-delà de son contenu, nous essaierons de saisir qu’une oeuvre d’art fait réfléchir et ne peut être soumise à une stricte perspective utilitariste.

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

Il est tout d’abord évident que l’art est une technique qui s’apprend et se pratique,

b

c’est-à-dire qui apprend à l’homme la maîtrise de son corps, tant dans le savoir-faire technique nécessaire à la réalisation de l’oeuvre

c

c’est-à-dire se voir entravé dans le mouvement de son corps et dans sa capacité de pensée.

Partie 2

a

Toutefois, il ne suffit pas de maîtriser des techniques pour être artiste et l’art ne peut se résumer au savoir-faire technique qu’il permet à l’homme de maîtriser. Il devient alors possible de penser que l’art sert le regard du spectateur. L’art est utile dans la mesure où il attise la curiosité du spectateur et lui faire découvrir des choses nouvelles

b

qui sont à l’origine de son plaisir

c

et qui lui permettent de connaître ce qu’il contemple.

Partie 3

a

Au-delà même de cette utilité esthétique et de la fonction de plaisir ou fonction hédoniste qui y est associée, l’art semble servir un idéal intellectuel et moral. En effet, l’art élève l’esprit de celui qui le contemple dans le sens où il propose une vision singulière du réel, celle d’un artiste qui est radicalement différent du spectateur.

b

Plus profondément d’ailleurs, chacun s’approprie une oeuvre et l’art n’a d’autre utilité que celle que chacun peut y voir et y découvrir,

c

ce qui permet à chaque personne en fonction de ses goûts et de sa curiosité, de s’interroger sur sa façon de voir les choses et le monde.