Doit-on apprendre à devenir homme ?

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L'analyse du professeur


La tendance naturelle à la sociabilité et à la reconnaissance juridique et morale des droits et de la dignité d’autrui ne paraît pas être immédiatement utile à l’homme pour survivre. Animal d’abord, il paraît au contraire naturel de se méfier du danger que peut représenter autrui, ce qui suppose que se trouve garantis ses rapports avec lui par des règles. Dès lors, pour devenir véritablement un homme, et dépasser les conditions d’une existence animale et fragile, les hommes doivent pouvoir s’entendre et se reconnaître, ce qui suppose une forme d’éducation morale et politique. Autrement dit, si l’homme doit vivre en société pour bien vivre, il doit apprendre à devenir un être sociable. Dès lors, la question de l’apprentissage possible de l’humanité de l’homme se pose. En effet, les deux définitions de l’homme comme animal et comme être sociable confrontent à un paradoxe. D’une part, l’homme est homme parce qu’il est animal et poursuit son intérêt particulier mais, d’autre part, l’homme est homme à partir du moment où il renonce à son animalité et devient un être politique.

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

Il paraît tout d’abord découler d’une définition de l’homme comme animal le fait que tout homme est naturellement homme dès l’instant où il agit en animal.

b

Il ne doit donc pas apprendre son humanité puisqu’elle se définit par la primauté de l’intérêt égoïste en lui.

c

Ce n’est en ce sens que plus tardivement dans la construction de son rapport aux autres qu’il peut devenir homme et définir les règles juridiques et morales d’une coexistence pacifique avec les autres.

Partie 2

a

Toutefois, en prenant la mesure du fait qu’il ne peut vivre sans les autres, il semble nécessaire de dépasser cette définition naturelle de l’homme pour montrer que l’homme doit apprendre à devenir homme en comprenant sa dépendance à l’égard des autres et de la culture qui réunit historiquement les hommes.

b

Ce processus de construction de soi n’est d’ailleurs pas un processus historique, mais une découverte de soi et un renoncement à l’animalité qui l’éloignait de son humanité.

c

Se comporter en animal est même une façon de renoncer à soi, c’est-à-dire un maintien dans une condition qui le rend de plus en plus incapable d’agir e,n tant qu’homme et de faire parler en lui l’intelligence qui le distingue de la bête.

Partie 3

a

Cette analyse semble élucider le paradoxe du sujet en montrant que l’homme ne devient pas homme au sens propre du terme, mais est toujours homme et devient citoyen en renonçant progressivement à une individualité égoïste.

b

Cependant, lorsqu’il se discipline et construit une société avec les autres, l’homme renonce à une part de son animalité, ou fait en tout cas semblant dans un premier temps d’y renoncer, au point qu’il finit par devenir un être docile qui ne laisse plus exprimer la nature en lui.

c

Ce qu’a perdu l’homme est donc ce qu’il avait de plus propre, c’est-à-dire la façon dont il s’affirmait lui-même, pour devenir comme les autres et adopter les mêmes règles que tout le monde. Il ne serait pas faux à cet égard de montrer que l’apprentissage de l’humanité est paradoxal puisqu’il se traduit par un renoncement à l’identité première. À la question de savoir si l’homme doit apprendre à devenir homme, il est donc possible de répondre de façon passablement ambiguë. Il doit apprendre à devenir homme s’il veut trouver les meilleures conditions de sa vie, mais en apprenant ainsi à devenir le même homme que les autres, il finit par ne plus être un homme, c’est-à-dire par ne plus rien avoir de propre et d’authentique qui lui appartienne à lui seul.