Avons-nous conscience de notre corps ?

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L'analyse du professeur


Ce sujet inspire deux remarques autour desquelles se constitue le problème. D’une part, il paraît évident que nous avons conscience de notre corps puisque dans l’expression notre corps, il semble nous appartenir de la façon la plus intime. Mais d’autre part, cette intuition de nous-mêmes semble difficile à justifier, dans la mesure où la conscience relève de la pensée immatérielle, alors que le corps semble le plus éloigné de cette opération abstraite puisqu’il est matériel et concret. Il va donc falloir évaluer la portée de ce paradoxe apparent afin de déterminer les rapports de la conscience au corps. Ainsi conviendra-t-il d’interroger le rapport entre conscience et corps pour savoir dans quelle mesure l’esprit est apte à posséder une représentation du corps soit fidèle à sa nature, et ne soit pas seulement la transposition abstraite d’une entité matérielle inatteignable comme telle.

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

La conscience du corps est une évidence posée par la pensée dans la mesure où je me représente indéfectiblement comme lié à ce corps, c’est-à-dire comme possédant une forme de substrat matériel dans lequel loge ma pensée ou mon esprit.

b

Cette conscience paraît d’ailleurs conditionnée par le fait que je m’expérimente comme vivant dans un corps doté de sensations qui sont les causes qui expliquent que je rationalise ce que je suis et que je produis une représentation idéelle de moi-même.

c

Aussi me faut-il reconnaître que j’ai éminemment conscience de mon corps puisqu’il est le plus proche de moi et me sert à agir et à exister.

Partie 2

a

Toutefois, ce rapport de la conscience au corps apparaît comme trompeur puisque la conscience prétend, en quelque sorte, posséder la maîtrise d’un corps qui, en fait, la précède et la détermine.

b

Je n’ai donc conscience qu’imparfaitement d’un corps qui ne vient à mon esprit que dans certaines limites, c’est-à-dire qui ne se donne à penser que de façon globale, sans que je ne maîtrise vraiment le détail de ce qui se joue dans ce corps.

c

Il devient donc possible d’identifier le corps représenté consciemment à une écume du corps propre ou du corps réel, dont la complexité et la diversité ne sont pas possible à synthétiser par mon esprit.

Partie 3

a

Poussé à l’extrême, ce constat m’oblige d’ailleurs à penser que le corps que je perçois et définit au moyen de ma pensée reste une abstraction qui n’exprime que métaphoriquement le concret.

b

En d’autres termes, le corps est traduit par la pensée mais n’est jamais vraiment élucidé parce que la pensée tire des règles abstraites des phénomènes qu’elle perçoit sans pouvoir jamais être certaine que ce qu’elle avance correspond réellement à des propriétés essentielles de son corps.

c

Je peux donc affirmer clairement que j’ai conscience de mon corps, mais je n’affirmerai par là que le fait que j’ai une conscience qui produit par elle-même une signification des phénomènes manifestés par ce corps, sans qu’elle soit en mesure d’y faire correspondre un substrat réel.