Annales BAC 2007 - Les oeuvres d’art sont-elles des réalités comme les autres ?

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L'analyse du professeur


Le statut de l’œuvre d’art est problématique. À la différence des autres objets techniques, qui ont une utilité qui dépend de l’usage que l’on en fait, comme un marteau sert par exemple à planter des clous, l’œuvre d’art semble jouir d’une gratuité utilitaire. Autrement dit, l’œuvre d’art ne sert pas à faire autre chose semble-t-il : elle existe par elle-même et pour elle-même. Pourtant les œuvres d’art sont bien des objets techniques, qui procèdent d’une fabrication et qui nécessite un savoir-faire particulier pour être produites. Les œuvres d’art sont donc des œuvres, c’est-à-dire des choses œuvrées qui sont descriptibles en tant que choses. Le paradoxe de l’œuvre d’art est donc de pouvoir être décrite comme une autre chose, sans que cette description ne parvienne parfaitement toutefois à dire ce qu’elle est. Comment dès lors expliquer cette particularité de l’œuvre d’art, qui est à la fois une réalité comme les autres, et possède une particularité qui semble échapper au fait même qu’elle sont des œuvres ?

[...]

Plan proposé

Partie 1

a

L’œuvre d’art est le produit d’un travail de l’artiste, qui est en ce sens l’analogue d’un artisan, puisqu’il met son savoir-faire au service de la production d’une chose concrète.

b

En outre, l’œuvre d’art possède un existence propre une fois créée, et cette existence matérielle se laisse définir de la même façon que les autres choses, par les propriétés de la perception sensible que l’homme peut en avoir.

c

Enfin, l’œuvre d’art est également un objet marchand, dont la valeur dépend globalement de la loi de l’offre et de la demande, de façon identique à tout objet marchand.

Partie 2

a

Toutefois, l’œuvre d’art possède une spécificité ou une particularité dans son mode d’existence : elle est gratuite, non pas en un sens marchand, mais au sens où elle ne sert pas à autre chose qu’elle-même.

b

Dès lors, l’œuvre d’art se distingue des autres choses en tant que sa valeur n’est pas évaluée à partir de l’intérêt pratique et objectif qu’elle possède, mais en fonction de critères plus subjectifs et relatifs (à des goûts ou des codes par exemple).

c

Il semble donc que l’œuvre d’art n’est non seulement pas une chose comme les autres puisqu’elle n’est pas soumise à une définition utilitariste, mais se distingue également de toute autre réalité en ce qu’elle ne peut être évaluée que par elle-même et dans son rapport à ceux qui la contemplent.

Partie 3

a

Il serait toutefois faux de distinguer radicalement l’œuvre d’art des autres choses, dans la mesure où toute œuvre d’art entretient un rapport dialectique au réel. Ne cherche-t-on pas en effet à savoir ce que représente une œuvre, ou ce qu’elle veut dire ?

b

En ce sens, le regard que tout spectateur porte sur l’œuvre d’art la rapproche intuitivement des autres choses, quand bien même l’œuvre d’art semble s’en distinguer. Il convient alors de définir l’œuvre d’art comme une chose différente des autres qui n’est toutefois intelligible qu’à la condition de la mettre en rapport avec les autres choses.

c

Les œuvres d’art ont ainsi le pouvoir de mettre en lumière d’une façon particulière les choses, de telle sorte qu’elles traduisent la façon dont un artiste voit ces choses ou, plus généralement, interroge son monde. Les œuvres d’art ne sont donc pas des réalités comme les autres, puisqu’elles sont uniques et ne sont pas utiles, mais elles ont le pouvoir de manifester ce que tout regard sur la réalité a de subjectif. Autrement dit, elles montrent que toute perception de la réalité est une interprétation éminemment subjective.