L'analyse du professeur
Le langage désigne le moyen de traduire et de transmettre une pensée en structurant logiquement un enchaînement de mots. À cet égard, il est possible de voir le langage de façon instrumentale comme un simple outil qui serait au service de la transmission de la pensée. Autrement dit, le langage aurait pour fin unique de permettre la communication entre les hommes, ou en tout cas entre deux entités qui cherchent à se comprendre et à échanger des signes (on peut ainsi parler du langage des animaux). Cependant, le fait que le langage ne traduit pas toujours exactement la pensée, ou les difficultés que pose la compréhension du langage, semblent indiquer que la fonction de communication n’est pas toujours évidente à réaliser. Il apparaît en effet que lorsqu’un individu cherche les mots adéquats pour exprimer sa pensée, il en vient parfois à buter sur ces mots, et à être obligé de préciser sa pensée, à la développer voire à la modifier. Dès lors, le langage ne servirait pas simplement à communiquer, mais il aurait un rôle dans l’élaboration de la pensée elle-même. Par ailleurs, le fait qu’il est parfois difficile de comprendre la signification du discours d’une personne, ou que ce qu’il exprime est en porte-à-faux avec ce qu’il fait, révèle le fait que le langage gêne parfois la communication, masque le sens et rend difficile la compréhension mutuelle. De ce second aspect semble se déduire l’inverse de la thèse : le langage met en échec la communication. Ce sujet confronte donc à un paradoxe. Si le langage est initialement destiné à servir à communiquer en tant qu’il serait un outil de traduction de la pensée, il apparaît en fait que le langage répond également à une logique propre qui rend difficile voire impossible l’intention de communication.
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Plan proposé
Partie 1
a
Le langage correspond à la traduction de la pensée, c’est-à-dire à une organisation logique des mots qui a pour finalité de donner forme verbale à la pensée.
b
Dès lors, la finalité du langage est bien la communication, puisqu’il s’agit d’exprimer oralement les idées de l’esprit afin de se faire comprendre d’un récepteur du discours qui partage le même langage.
c
En ce sens, le langage serait même la forme par excellence de la communication, puisqu’il est un intermédiaire structuré qui codifie très exactement l’ensemble des idées, en ayant donc pour ambition de trouver un équivalent pour chaque idée.
Partie 2
a
Toutefois, il semble que le langage pose des difficultés de formulation. Il est parfois en effet difficile de trouver le mot adéquat à l’idée que l’on cherche à exprimer.
b
Par ailleurs, le discours que l’on prononce n’est pas toujours compris par celui qui l’entend. Le langage est théoriquement universel, mais il dépend de la maîtrise personnelle du récepteur, qui peut très bien ne pas comprendre un discours parce qu’il ne maîtrise pas assez précisément la langue dans lequel ce discours est exprimé.
c
Enfin, au-delà de la maîtrise technique du langage, tout discours requiert la maîtrise d’un univers culturel de signification. Or cet univers diffère parfois profondément selon les personnes, et la communication peut très bien échouer parce que les interlocuteurs ne partagent pas le même univers de sens et la même culture.
Partie 3
a
Le langage peut ainsi être à l’origine de l’échec de la communication. Il apparaît comme un vecteur toujours en tension entre ce que veut dire le locuteur et ce que peut comprendre le récepteur. Le langage devrait donc être perçu de façon paradoxale. D’une part, il servirait moins à communiquer qu’à exprimer et enrichir la pensée de celui qui cherche à exprimer ses idées. Et d’autre part, le langage réellement exprimé, le discours entre deux personnes, se nécessairement victime d’un appauvrissement puisque le mots ne traduisent qu’imparfaitement la pensée et ne sont compris que dans leur généralité.
b
Néanmoins, ce constat est valide à la seule condition de définir la communication comme la transmission de la pensée d’une personne à une autre personne qui écoute le discours. Or cette définition de la communication est restrictive, puisque l’acte de communication ne dépend pas seulement de la volonté de dire du locuteur. Tout discours acquiert ainsi son indépendance par rapport à un locuteur, et s’offre à une interprétation riche, qui excède l’intention de communication uniquement envisagée à partir du locuteur.
c
Cette redéfinition de la communication permet ainsi de mettre au jour que le langage ne traduit pas forcément de façon parfaite la pensée d’un locuteur, mais sert toujours la communication, puisque l’interprétation du discours permet de construire des significations communes, favorise le dialogue et oblige les individus à s’entendre.